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Economie circulaire : bientôt dans les normes

23/01/2017

Limiter la consommation et le gaspillage dans la production de biens et de services, "Remanufacturing", revalorisation, réutilisabilité,... de nouveaux concepts à expliciter et développer. L'enjeu pour les industriels : garder la maîtrise de leurs produits sur le marché.

Alors, comment inscrire les normes de la mécanique et du caoutchouc dans la dynamique de l'économie circulaire ? C'est sur cette question qu'a réfléchi le Comité d'orientation de l'UNM réuni le 1er décembre 2016, à La Maison de la mécanique, sous la présidence de Carole Gratzmuller (Etna Industrie).

Du point de vue réglementaire

France de Baillenx, Directrice Environnement de la FIM, a rappellé les grands thèmes de l'économie circulaire : écoconception, écologie industrielle et territoriale, économie de fonctionnalité, réemploi, réparation, réutilisation et le recyclage. Elle a expliqué que l'économie circulaire procède à la fois de mesures réglementaires classiques et d'une démarche de droit souple, incitant de manière non directive à des comportements vertueux.

Au plan européen, même s'il n'existe pas de définition juridique de l'économie circulaire, la Commission européenne a historiquement mis l'accent sur le concept d'efficacité des ressources via la gestion des déchets (directive sur la mise en décharge, directive cadre sur les déchets, directives sectorielles DEEE, VHU, Emballages, Piles...). Elle a ensuite évolué avec un "Paquet Economie Circulaire" (CEP 2, décembre 2015) aux visées plus larges, englobant l'ensemble du cycle de vie du produit.

En France, la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte inscrit dans le Code de l'environnement un objectif global de découplage progressif entre le taux de croissance du PIB et la consommation intérieure de matières premières. Elle contient également des objectifs chiffrés et des exigences sur la lutte contre l'obsolescence programmée des produits manufacturés. Celle-ci, définie comme l'ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d'un produit pour en augmenter le taux de remplacement, constitue un délit.

Les travaux déjà engagés

Il est très important de disposer de normes pour réaliser des essais comparables et bien définir les essais et critères de réparabilité, durabilité ou recyclabilité qui permettront d'appliquer ces réglementations. C'est par cette affirmation que Pascal Vinzio, vice-président Recherche et Prédéveloppement Innovation de KSB, fabricant de pompes et de robinetterie, a débuté la présentation des travaux de normalisation déjà initiés au plan européen sur l'utilisation efficace des ressources.

La directive écoconception 2009/125/CE, applicable aux produits liés à l'énergie, est aujourd'hui essentiellement orientée vers l'efficacité énergétique. Or, la Commission Européenne souhaite étendre les mesures d'exécution actuelles à l'utilisation efficace des ressources. Elle a émis une demande de normalisation (M/543) pour établir de l'ordre de 20 normes qui devront tenir compte de la durée de vie des produits étendue, de la capacité à réutiliser des composants ou à recycler des matériaux sur les produits en fin de vie, de l'intégration de composants réutilisés et/ou de matériaux recyclés dans les produits. Cela dans un délai très court puisque les normes devront être publiées le 31 mars 2019. Tout ou partie de ces normes sera ensuite utilisé pour fixer des exigences plus précises pour des produits spécifiques.

Ce mandat très large a des conséquences potentielles lourdes sur les pratiques existantes et sur les stratégies et organisations des entreprises. La Mécanique doit être présente : organiser la ré-utilisation de pièce est un processus à part entière et de nombreuses questions se posent : quelle traçabilité des produits, quelles vérifications, quelle responsabilité du fabricant sur les caractéristiques des pièces réintroduites dans la chaîne de valeurs ? Il faut anticiper les contraintes normatives et réglementaires en gardant la maîtrise et en valorisant les méthodes développées dans la mécanique, notamment par le Cetim.

Une application concrète dans le domaine des roulements

L'UNM a déjà recensé dans son champ de compétence quelques travaux en cours sur ces thématiques pour les engins de terrassement, machines forestières portatives à main, machines et installations pour le concassage, criblage, triage, lavage, recyclage, systèmes de réfrigération et pompes à chaleur, chariots industriels, caoutchouc brut et mélanges non vulcanisés, briquettes de meulures de rectification de roulements.

Ce dernier cas est très intéressant et les travaux viennent d'aboutir à la publication de la norme NF E 22-450. La profession ARTEMA, syndicat des industriels de la mécatronique, travaille depuis 1992, avec le Cetim à la reconnaissance des meulures de rectification de roulements dans la réglementation. Laurence Chérillat, Déléguée Générale du syndicat, a illustré toutes les étapes qu'il a fallu franchir sur plus de 20 ans pour aboutir à cette reconnaissance. La dernière étape qui concerne la mise au point de la norme NF E 22-450 a été la plus courte : 15 mois, et la plus facile en raison de l'expérience accumulée depuis des années. Il faut maintenant débloquer les filières de valorisation et ouvrir ce marché à l'Europe et l'international en proposant la norme française dans le comité international.

Déterminer le type de norme à mettre au point

D'autres perspectives ont été identifiées: la démarche et l'ouvrage Technologies Prioritaires en Mécanique 2020, élaboré par le Cetim en partenariat avec la FIM, le CETIAT et l'Institut de Soudure en sont l'illustration. Pascal Souquet, Délégué scientifique au Cetim, précise que cet ouvrage intègre l'économie circulaire. Il établit un lien entre les 7 piliers de l'économie circulaire, les technologies prioritaires 2020 en rapport avec le domaine d'activité de l'UNM et les commissions potentiellement impactées : équipements, produits, composants, caoutchouc, environnement, mécatronique... A partir de 7 exemples, Pascal Souquet a fait ressortir plus précisément le type de normes à mettre au point : définition de critères d'évaluation des performances (efficacité énergétique, impact environnemental, autonomie des équipements), déclinaison sectorielles de concepts génériques, méthodes de conception fiabiliste, accompagnement de la réglementation.

En résumé, l'ensemble de ces présentations illustre l'étendue des champs couverts par l'économie circulaire ainsi que leur impact sur le plan réglementaire et normatif. La valorisation des méthodes développées dans la mécanique et le caoutchouc doit être poursuivie et les domaines identifiés faire l'objet d'investigations pour mettre au point des outils adaptés.

 

 

 Crédit photos : Proméca communication (image 1), SKF (image 2), image 3 (DR)