COMITÉ D’ORIENTATION 2019
Nouveaux matériaux, matériaux fonctionnels, nouvelles technologies de mise en œuvre… figurent parmi les axes majeurs de l'industrie du futur. Autant d'enjeux qui font naître de nouveaux besoins en normalisation.
Outre son rôle de validation du programme pour les trois années à venir, le Comité d’Orientation de l’UNM dégage, autour d’un thème transverse, des axes de réflexion pour la normalisation mécanique, acier et caoutchouc. Le 2 décembre 2019, sous la présidence de Carole Gratzmuller (Etna Industries), la réunion a été consacrée au thème des matériaux : quelles normes quand le matériau et/ou la surface portent de nouvelles fonctions ?
Pour fixer le cadre, Pascal Souquet, délégué́scientifique au Cetim et administrateur de l’UNM a présenté́ les tendances et besoins identifiés en mécanique. Avec l'Industrie du Futur, les matériaux sont soumis à de nouvelles contraintes. La veille technologique effectuée par le Cetim montre que les matériaux industriels sont améliorés et qu'ils font l'objet de traitements et de fonctionnalisations.
Le matériau fait maintenant partie intégrante du composant
Les matériaux de pointe se développent et rentrent dans des applications plus poussées. Leur niveau de maturité́ est très varié́ et le guide des technologies prioritaires 2025 en cours de finalisation au Cetim actera les développements nécessaires, notamment sur les méthodes de caractérisation. Sans oublier la simulation numérique qui permet de prédire la microstructure en fonction de paramètres liés au process ou d'intégrer les calculs à la modélisation. Le matériau fait maintenant partie intégrante du composant : décrit par des fonctions attendues, évalué par un niveau de performances fonctionnelles et qualifié par rapport aux conditions d’utilisation. Il faut donc compléter l’existant par une normalisation de formalisation pour cadrer l’expression des besoins spécifiques "Matériaux", une normalisation de méthodologie d’essais pour qualifier les performances réalisées par rapport aux exigences attendues et une normalisation des données matériaux et de leurs protocoles d’échanges pour les rendre disponibles sur une très longue période.
Les normes doivent s’adapter aux nouvelles fonctions des produits
Patrick Le Pense, responsable produits plats Europe chez ArcelorMittal dans le secteur de la construction et président de la commission UNM AC 109 qui traite des produits plats en acier revêtus et non revêtus pour formage à froid, abonde dans ce sens. Les clients utilisent les normes de produit comme un référentiel de base mais ils les adaptent en demandant des caractéristiques plus sévères pour une performance supérieure. Les catalogues des fournisseurs doivent s'adapter en permanence. En parallèle, les nouvelles orientations de la Commission Européenne liées au marquage CE dans le domaine des produits de construction présentent un risque non négligeable. La tendance est de supprimer les conditions de livraison pour ne garder que des exigences de performance, charge au client d'indiquer la façon dont il souhaite que l'acier soit fabriqué. Les erreurs et questionnements risquent de se multiplier. De nouvelles fonctions se développent pour les produits et les normes doivent s'adapter. Devant ces besoins de personnalisation, les enjeux de traçabilité́ sont de plus en plus prégnants. Là encore, les normes sont fondamentales pour structurer les données, assurer leur interopérabilité,́ leur conservation et leur disponibilité́.
Faire disparaître la multiplicité des référentiels
Aurélie Achille, expert traitement thermique chez Faurecia et présidente de la commission UNM 24 "Traitements thermiques" présente les besoins de maîtrise de ces procédés. Pour son activité́ de sièges de véhicules, Faurecia traite thermiquement 1 million de pièces par jour à travers le monde avec des exigences de sécurité́ et une réglementation de plus en plus pointues. La multiplicité́ des référentiels est une difficulté́ que Faurecia a entrepris de surmonter en s'investissant en normalisation internationale. Passer d'audits clients spécifiques à un référentiel ISO unifié représente d'importantes économies d'échelle. Autre besoin : disposer d'une méthodologie de détermination des R&r (répétabilité́ et reproductibilité́) des moyens de mesures des caractéristiques métallurgiques.
Rendre la matière intelligente
Pour le caoutchouc, même si les caractéristiques sont différentes, les besoins normatifs restent similaires. Patrick Heuillet, Directeur R&D au LRCCP, indique que les élastomères sont des matériaux d'interface utilisés dans toutes les industries. Pour certaines fonctions, il est nécessaire d'associer l’élastomère à un autre matériau. Depuis les années 2000/2010, des matériaux renforcés ont vu le jour jusqu'au besoin de rendre la matière intelligente. Les fonctions de la pièce commencent à être enrichies par l’intermédiaire de capteurs, de Tags RFID. Le domaine du caoutchouc va devoir compléter son panel de normes d'essais physiques, d'analyses des matériaux élastomères et de grandes familles de pièces, par des normes sur le traitement de surface des pièces et sur l'intégration d'intelligence : sélection, implantation, tenue aux environnements, traitement des données, stockage des données, communication,...
Nouvelles technologies, nouveaux enjeux
Jean-Marie Lambert, responsable développement chez Eramet fait part du point de vue d'un fournisseur de poudre métallique pour la fabrication additive. Cette technologie bouleverse les manières de concevoir et de contrôler les pièces. Le besoin en normes est important. Eramet est très investi en normalisation pour définir les caractéristiques des poudres. Même si des normes existent déjà̀ sur la composition chimique, la granulométrie, la morphologie, les propriétés physiques, de nouvelles normes sont nécessaires sur la tomographie, l'étalabilité ou la rhéologie.
Crédit photos : SHUTTERSTOCK / EUROFER